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Phénomène de Presse

Ecritique médiatique

Dans mon cursus d’humoriste et de comédien, j’ai pris option sociologie intermittente, statut oblige !

En conséquence et pour l’exercice de la discipline, je fréquente régulièrement un troquet pour parfaire mes analyses sur les us de la population. Je siège donc, le matin, autour du premier café réanimateur, en observant les gens. Ceux-ci entrent à leur tour, s’attablent avec une mine standardisée à la manière du réveil compliqué, de la pause chronométrée avant le boulot, de la sacro-sainte routine qu’il faut respectée sinon la journée est fichue et puis il y a les bavards :

— Tu connais la dernière ?

Sans parler du discours météo propice à l’acquittement d’un élan social et sociable.

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information citation

Dans tous les cas, leur mine encore enténébrée est réglée comme du papier à musique mais vide et surtout vierge de préoccupation supplémentaire, la journée ne fait que commencer. Puis, la presse, à savoir le journal amorce son insidieuse circulation, de table en table avec ses gros titres aguicheurs.

Les commentaires fusent alors, chacun y va de sa verve, réagit avec détresse, injustice, jalousie, expertise, bref toute émotion secrétée par des nouvelles peu joyeuses en général. Les poncifs d’usage ne manquent pas à l’appel :

« C’est encore nous qui allons payer pour ces gens-là »

« Tous des pourris »

« C’est injuste, débile, lamentable… »

Une forme de rapprochement s’ensuit dans l’unité du discours ou au contraire dans la division, selon, souvent, la catégorie socio-professionnelle des protagonistes. Pour parachever le tout, les providentielles rubriques météo et horoscope finalisent les débats.

Résultat : les gens sont inquiets, en colère, meurtris ou encore déçus, les augures médiatiques ont scellés leur destin dans la camisole de la soumission et de la résignation.

Mais que s’est-il passé ?

Le temps de cerveau disponible est à son paroxysme le matin, moment qui permet de reprendre ses esprits ou ceux des autres… Il est donc judicieux à ce stade de faire le plein de soi avant de subir l’assaut d’influences diverses et parfois pernicieuses. C’est justement le moment préféré des médias qu’ils soient télévisuels, radiophoniques ou papier pour déflorer, et c’est un euphémisme eu égard à la violence des informations, pour déflorer donc la virginité et la candeur matinales des esprits peu aguerris. Ces derniers repartent alors ensemencés d’idées noires, réductrices à l’horizon limité, chargés d’un stress sournois qui enfante des perspectives d’avenir déprimantes voire un aigrissement latent. L’esprit critique s’embrouille, les cases « peur » et « manque » sont irrémédiablement cochées octroyant un libre-arbitre précaire, une perte de confiance et les chaussettes grosses d’un moral tombé dedans.

C’est officiel donc c’est vrai !

Et les bonnes nouvelles, celles qui donnent du baume au cœur, elles sont où ?

Deux solutions s’imposent pour pallier ces désagréments, ne plus écouter les informations ou devenir journaliste soi-même en cherchant ce qui sied à l’objectivité et surtout davantage d’optimisme. Ces deux alternatives reviennent, du reste, à exercer son droit à la légitime défense.

Par dépit ou déni et pour l’illusion d’une rébellion éphémère, les gens renforcent leur statut de grandes gueules typiquement français mais en vain, à moins qu’un réveil soudain…

L’émancipation est-elle à l’ordre du jour ?

Une autre ? Une qui préserve …

Étrange verbe pouvoir

Ecritique à fort potentiel

Le Français est une langue curieuse. Sa grammaire, ses conjugaisons et enfin son orthographe en font un langage ardu à l’apprentissage et à la maîtrise.

Peut-être est-il responsable d’une forme d’intelligence française propre à elle-même, empreinte de ses particularismes rebelles exacerbés ; il en découle tout naturellement une admiration sans borne pour qui la possède parfaitement.

Pour l’exemple, passons en revue quelques verbes irréguliers pourfendeurs d’une logique aussi absconse qu’intrépide.

Commençons au hasard avec le verbe pouvoir. Pouvoir fait dans le pu dès lors qu’il participe au passé. Autant dire qu’il vaut mieux pouvoir à l’instant présent afin d’éviter le pu d’un passé infectieux. Voici un premier sens caché reflétant fictivement l’inconscient collectif français.

etrange verbe pouvoir
Etrange verbe pouvoir

Paradoxalement, le verbe voir fait vu. Conséquemment, pu devrait provenir du verbe « poir », conférant ainsi au fruit homonymique des vertus capacitives insoupçonnées.

D’ailleurs le verbe boire fait bien bu alors que savoir fait su, comme quoi la connaissance transpire de ce verbe.

D’un autre côté, si savoir fait su, bu devrait provenir de « bavoir » et non de boire, le bavoir étant effectivement en rapport avec la boisson mais il vient de baver qui est, en fait, le contraire de boire.

Pu, selon ces hypothèses, pourrait également émaner de « pavoir » qui fait indubitablement penser au grand pavois des gens de pouvoir mais aussi au verbe paver qui n’est lui-même pas très éloigné de baver.

Vous voyez tout se recoupe !

Est-ce que vous suivez ce canevas clair et limpide qui montre avec une jovialité confondante la simplicité de la langue française.

Notons également dans la poursuite de notre raisonnement qu’apercevoir, normalement finirait en « apercevu » et non en aperçu ; pour preuve, il nous reste la locution « à perte de vue » mais c’est un autre débat.

Revenons à pouvoir, le verbe étrange par excellence et qui, de plus, a l’avantage d’expliquer à lui seul l’état d’esprit des Français. Au présent, pouvoir donne peux, ce qui n’est pas énorme eu égard aux prétentions du verbe. Remarquez, en anglais et en allemand c’est « can » (kann) et quelqu’un qui can meurt, c’est donc pire. Je ne vous parle même pas de l’expression « yes we can »…

Au futur, pouvoir se transforme en pourrai, pourra autant dire pourri oui !!!

Tandis que les Anglais au conditionnel jouent des could …

Vous l’aurez compris, il n’y a guère qu’à l’infinitif que pouvoir le reste, donc virtuellement ; autrement c’est pas beaucoup, c’est pourri et ça sent mauvais.

Je vais donc déposer une pétition pour corriger cet épiphénomène transversal oblique de la dégénérescence linguistique française.

Adoptons le verbe « poir », je pois, il poit, il poira etc …

Vous poirez signer la pétition sur le site poir.fr, je pense que c’est un devoir citoyen et encore je passe sous silence les méandres scabreux et douteux du verbe devoir, justement très culpabilisant.

 

Un autre ? Une laxative ?

Pourquoi je ne fais pas de teaser

  • Teaser (ou aguiche), message publicitaire aguichant utilisé dans le teasing (ou l’aguichage), technique de marketing.
  • Teaser, type de leurre utilisé dans la pêche à la traine.
prendre le pli citation humour

De prime abord le mot teaser évoque des effluves nébuleuses et contraires à la présentation décente d’un spectacle sain. Un alcoolique ne peut prétendre avec crédit à la promotion d’une performance.

Ce vocable anglophone obéit en outre à une mode lénifiante qui consiste à transfigurer un mot en rêve américain par le truchement de son synonyme exotique, histoire de faire « style, genre »…

Je préfère qu’on boive mes paroles voire qu’on s’en enivre, sans le recours fallacieux aux substantifs addictifs.

Voilà le pavé jeté dans le « j’en ai marre » des tendances en guise d’introduction polémique.

Parmi les outils de marketing, le teaser ou « extraits » a pour dessein l’attractivité d’un spectacle ou d’une « œuvre » artistique en créant l’illusion de son inénarrable efficacité comique par le prélèvement minimaliste de moments de bravoure destinés au culte ; quelques vannes bien senties suffiront à remplir la besogne sans pour autant rendre compte de l’ensemble ou d’une cohérence.

Pour les artistes « autre », les plus rares et pas nécessairement les plus chers, l’invitation à entrer dans leur univers ne trouvera point de salut dans ce type de stratagème commercial. Un univers ça s’installe, ça se crée, ça infuse, ça imprègne avec progressivité, rythme, nuance, étonnement en dehors du sablier standard labellisé compris dans le kit de communication formatée.

Aujourd’hui l’image fait tout mais en tant qu’iconoclaste et artiste foncièrement réservé, je ne puis me résoudre au comportement de coq de basse-cour. En dehors de toute option publicitaire de bonimenteur, je choisis la plume, l’expression scénique, plus profonde, sincère et authentique.

L’instant présent du direct ou live d’un spectacle se ressent, se vit, échappe à toute mise en boîte minutée, bien que je ne sois pas par nature contre la mise en boîte…

Dans le paysage humoristique actuel, le concert omniprésent et assourdissant des teasers tient davantage du concours de celui qui pissera le plus loin, annulant de fait le résultat escompté.

Occuper le terrain par tous les moyens me fatigue ; le vacarme médiatique, source de stress, engendre à son tour comme nécessaire réponse le recul et le calme.

Faire de la scène pour se la jouer ou simplement jouer sur scène, telle est la question !

Cébéji

État de l’humour en France